Numérique / Territoires

Couverture et réception numérique de la TV, HD et TMP : quels réseaux soutenir ? Février 2008

Ma ville, mon département, ma région sont elles ou seront-elles bien couvertes pour recevoir la télévision numérique ? Cette question simple a des réponses complexes et évolutives, parce que le déploiement de réseaux est en cours (notamment la TNT), les usages et technologies se diversifient (Haute Définition, Télévision Mobile Personnelle), ainsi que l'équipement des ménages (multi-équipement, réception sur mobiles ou ordinateur etc.).

1 - Des zones de couvertures en extension permanente

Il n'existe aujourd'hui aucun "plan" finalisé, pour aucune des technologies disponibles.

Côté technologies radio , la diffusion par satellite et par hertzien terrestre sont les plus utilisées.

La couverture satellitaire a une empreinte presque totale sur la France. Il reste marginalement des cas d'inégibilité, s'il n'est pas possible de pointer vers le satellite (fond de vallée, bâtiment faisant obstacle, impossibilité d'installer une parabole pour des raisons réglementaires ou mauvaise orientaton d'un appartement...).

Toutes les chaînes gratuites diffusées par la TNT, en simple définition, y compris les éditions régionales de France 3, sont recevables sans abonnement par satellite. Il n'y a donc de ce point de vue pas de problèmes de "zones blanches" aussi graves que pour le haut débit.

Les objectifs d'extension de la Télévision Numérique Terrestre, pour une réception en simple définition, sont fixés par les pouvoirs publics (législation et CSA), avec un minimum de couverture de 91% par département à la fin 2011 pour les principales chaînes.

Les objectifs pour fin 2008 sont une couverture de 89% de la population en métropole et de 75 % de chaque département, ce qui correspond à une priorité donnée au rattrapage géographique par rapport à 2006/2007.

Cependant il n'existe aucune cartographie correspondant à l'objectif final de couverture, car la planification totale des fréquences n'est pas finalisée. Et quand bien même elle le serait, les zones changeront après 2011 puisque les fréquences, puissances et diagrammes de rayonnement attribués aujourd'hui ne sont pas définitifs, du fait d'une migration prévue après l'extinction de l'analogique. Les zones couvertes ne seront donc pas exactement les mêmes. Rajoutons que depuis un site d'émission commun les différents multiplex peuvent avoir des zones de couverture différentes, et que les engagements de couverture sont différents également (les chaînes historiques ont un engagement plus fort, de façon à faciliter l'extinction de l'analogique).

Pour la haute définition, c'est...un peu moins clair. Un seul multiplex, le R5, avec trois chaînes, est aujourd'hui défini, pour diffuser les chaînes HD de TF1, M6 et France 2, et Canal+, sur le R3, va obtenir une autorisation après un "concours". Il est question de lancer d'autres chaînes, mais leur zone de couverture serait plus restreinte, en attendant l'extinction de l'analogique. Un foyer sur 4 est déjà équipé en HD, alors que les principales chaînes n'ont pas démarré.

Pour la télévision mobile personnelle, il va falloir créer un nouveau réseau d'émetteurs, plus dense, afin de permettre une réception à l'intérieur des bâtiments. Les engagements de couverture sont très faibles : 30 % de la population en 2011 et 60 % en 2014, c'est à dire les zones urbaines.

En attendant les opérateurs de téléphonie mobile proposent certaines chaînes, via l'UMTS, mais dans des conditions technico-économiques qui en limitent l'usage (un million de clients fin 2007, consommation mensuelle inférieure à une heure). L'UMTS ne couvre que les zones urbaines (70 % de la population). La réutilisation de la bande des 900 MHz, autorisée début 2008 par l'Arcep, va permettre une extension géographique correspondant aux engagements pris dans les licences, même si c'est avec retard.

Les autres technologies radio bi-directionnelles, comme le WiFi et le WiMAX, ont trop peu de bande passante pour diffuser simultanément des chaînes de télévision classiques et sont destinées en priorité aux communications électroniques.

Côté réseaux filaires , il n'est guère plus facile de prévoir finement la couverture sur le territoire.

L'opérateur principal du câble ne fait plus d'extensions de son réseau, sauf s'il y est contraint par son contrat avec une collectivité délégante. Le déploiement de réseaux en fibre optique n'en est qu'à son début, avec des prévisions de couverture de 25 à 50% de la population à l'horizon 2015. Les empreintes de ces deux réseaux filaires seront sensiblement les mêmes, en tout cas par l'initiative privée, à savoir les zones denses. Le câble, s'il a été rénové, et la fibre optique, permettent d'offrir la haute défintion et des services de vidéo à la demande.

L'extension de la couverture ADSL dépend de plusieurs facteurs. Le signal s'affaiblit avec la longueur de la ligne : au delà d'une certaine distance depuis le DSLAM, il n'y a plus assez de bande passante pour recevoir la télévision. En utilisant une compression en MPEG4 au lieu du MPEG2, il y a besoin de moins de bande passante, donc on peut gagner en portée...pour les chaînes en simple définition. Autre possibilité : rapprocher le DSLAM de l'usager (en le mettant au sous-répartiteur) ou fibrer le répartiteur s'il était desservi par une simple liaison en cuivre. Bref, la couverture dépend des stratégies d'investissement des différents opérateurs et de la configuration des réseaux existants (longueurs des différents segments, diamètre de la paire de cuivre).

Le principal FAI, Orange/France Télécom, a décidé d'accentuer sa présence dans l'audiovisuel en lançant un bouquet de chaînes et en acquérant une partie des droits du foot. Il va donc à la fois pousser les solutions adsl, en baissant les seuils d'éligibilité de 42 à 50 dB d'affaiblissement des lignes, et lancer une offre satellitaire en complément.

2 -Quels sont les modes de réception de la télévision ?

Cette question commence à faire l'objet d'études de plus en plus précises, menées sous forme d'enquêtes. Les méthodologies étant différentes, il reste des écarts entre les données, mais elles montrent toutes sans surprise une numérisation croissante et une diversification des modes de réception.

Quelques données à retenir :

  • seulement un tiers de la réception est en hertzien analogique sur le poste principal
  • la moitié des foyers a une réception principale en numérique (entre 46,5 % pour TdF et 57 % pour le CSA)
  • un tiers des foyers n'ont aucun appareil recevant en numérique (34% pour TdF)
  • un quart est entièrement en numérique (27 % pour TdF)

 

En résumé : la numérisation est au milieu du gué. Largement entamée pour le poste principal, beaucoup moins pour les autres postes, et un tiers des foyers est complètement à l'écart.

L'étude publiée par le CSA donne une part prépondérante au numérique, mais sur le "moyen principal" de réception.

L'Arcep et le Conseil général des technologies de l'information publient une enquête annuelle, ce qui permet de mieux cerner la tendance. Elle concerne non pas le foyer, mais l'individu (de 12 ans et plus), à partir d'un échantillon représentatif de la population. Un même individu pouvant recevoir la télévision sur différents supports, le total est supérieur à 100%. De mi 2006 à mi 2007, la TNT a connu un vrai décollage, ainsi que l'ADSL, tandis que le câble régressait.

suit également les équipements et usages de la téléphonie, du haut débit fixe et mobile.

TdF, dont l'intérêt est centré sur le hertzien terrestre, possède son propre "baromètre".

descend à un niveau assez fin, montrant qu'un même téléviseur peut être raccordé à plusieurs réseaux, et donne des chiffres sur la TNT par région.

3- Faut-il que les collectivités financent les compléments de couverture ?

En 2008, et probablement en 2009, il sera impossible de déterminer précisément les zones qui ne seront pas couvertes par la TNT après l'extinction de l'analogique.

Concernant la TNT, les débats parlementaires de la loi sur la télévision du futur ont clairement montré que le dispositif finalement adopté permettait de ne pas faire appel aux financements des collectivités : des engagements de couverture sont pris par les éditeurs, et pour le complément une offre satellitaire gratuite a été mise en place.

Il en est de même pour l'équipement des ménages les plus modestes, qui, même situés dans une zone de couverture, pourraient se voir privés de télévision à l'extinction de l'analogique. Un fonds national permettra de les aider à acquérir les matériels de réception nécessaires.

Le principe général est celui d'une "neutralité technologique" : l'important est d'accèder au service, quelque soit le moyen retenu (filaire, satellite, hertzien terrestre).

Il convient également d'être prudent au niveau juridique. Les multiplex de la TNT comportent des chaînes privées. Il serait contestable de n'en soutenir que certaines chaînes avec des financements publics. De plus, à terme, il est envisagé de passer de 6 à 10, voire 12 multiplex (sans compter la TMP). Les collectivités qui par le passé ont aidé au déploiement de la 5 et de la 6 en analogique pourraient donc voir la facture multipliée par 5 ou 6 !

Enfin il est opportun d'étudier s'il est possible de trouver des solutions globales à la desserte des territoires, à la fois en termes de télévision et de haut, voire très haut débit. Nous ne sommes pas que récepteurs, passifs, de télévision via des réseaux descendants. Les modes de consommation de l'audiovisuel changent (vidéo à la demande...) et surtout les besoins sont bien d'échanger, donc de pouvoir aussi émettre, avec des réseaux multi-services, pour les particuliers et les professionnels. Bref, de voir si la fameuse convergence ne nécessite pas de faire converger les financements publics plutôt que de les éparpiller.