Numérique / Territoires

Fusions et réseaux ouverts, du neuf avec de l'ancien Mai 2005

La fusion Neuf-CEGETEL, si longtemps en négociation, s'est concrétisée au désavantage de l'opérateur alternatif historique, dont les actionnaires ne détiendront que 28% du nouvel ensemble. Dans un premier temps, les deux réseaux seront conservés, celui de CEGETEL pour la voix classique, celui de 9T pour l'IP.

Petit deux

Neuf-CEGETEL se positionne comme le numéro deux du secteur, avec 3,1 millions de clients dans le fixe, 850.000 à internet (derrière Free) et une rentabilité très améliorée si les promesses de synergie (190 millions d'euros, passant notamment par un plan social) se réalisent. Il devra néanmoins d'une manière ou une autre trouver un débouché dans le mobile, qui représente la moitié du chiffre d'affaires des télécoms en France, pour s'affirmer comme un véritable numéro deux. Et son chiffre d'affaires global (2,6 milliards d'euros en 2004) est vingt fois plus petit que celui de France Télécom (47,2 milliards), et même inférieur au seul résultat net de l'opérateur historique (2,8 milliards)...

Remise en question des réseaux ouverts ?

Cette fusion n'est pas une surprise pour les collectivités, mais a-t-elle des conséquences pour la mise en place des réseaux d'initiative publique ouverts aux opérateurs ?

Il faudra tout d'abord examiner la stratégie du nouveau groupe. Jusqu'ici, Neuf Télécom avait toujours prôné un ouverture des réseaux, seul moyen de pouvoir amener une véritable concurrence. Cette stratégie s'était concrétisée dans l'activité d'origine de LDCom, opérateur d'opérateurs, et même quand il avait racheté ses clients en difficultés, sa filiale rebaptisée LD Collectivités s'était positionnée pour établir et exploiter des réseaux ouverts en répondant aux Délégations de service public des collectivités. Il peut être tentant désormais de refermer le jeu et de restaurer les marges dans une situation plus fermée, vis-à-vis des autres opérateurs (Completel, Colt, Télé2...) comme des fournisseurs d'accès à internet qui n'ont pas de réseau (AOL, Club-Internet...). Mais est-ce jouable quand le numéro deux est si loin du numéro un ? Tout le monde va guetter les signes du nouveau positionnement...

Plus vite, plus loin et pour tous

Le marché des télécoms fonctionne par cycles, avec des périodes de forte concurrence, des innovations de services et de marketing, des baisses de prix et une diversification des acteurs, puis les financiers arrêtent le jeu en consolidant les vainqueurs. C'est là que l'existence ou non de réseaux ouverts prend toute son importance, car l'enjeu est bien de ne pas laisser se constituer d'oligopoles, avec leurs conséquences en matière de moindre innovation et de hausses de prix. Les réseaux d'initiative publique ouverts ont plusieurs effets :

  • ils permettent à ces opérateurs consolidés, d'aller beaucoup plus loin dans les ''zones grises'' qu'ils ne le feraient dans leur logique économique autonome ;
  • ils confortent les autres opérateurs dans les zones grises, mais aussi dans les zones concurrentielles en exerçant une pression globale pour l'ouverture des réseaux ;
  • ils sont indispensables à la création d'opérateurs et fournisseurs de services locaux, s'appuyant sur leurs infrastructures et sur les offres de gros des opérateurs d'opérateurs ;
  • ils permettent l'innovation dans les services, notamment en poussant la fibre plus loin ou par l'utilisation de technologies alternatives.

Il n'est pas anodin de constater que dans la fusion Neuf-CEGETEL, celui qui a gagné est celui qui avait misé sur les réseaux ouverts et sur l'IP. C'est aujourd'hui aux collectivités de maintenir une dynamique.