Numérique / Territoires

Numericable et Completel, des synergies ? Septembre 2007

Pour 723 millions d'euros, Altice et Cinven, conjointement propriétaires de Numericable, rachètent Completel, opérateur spécialisé dans les entreprises. Dans un deuxième temps, un rachet en LBO serait effectuée sur cette société, après l'avoir sortie de la bourse. Simple opération financière ou rapprochement stratégique ?

Completel est le troisième opérateur français dans le secteur des entreprises, loin derrière France Télécom (environ 70% du marché de détail) et Neuf Cegetel (environ 15%). Ce marché est peu concurrentiel et dégage des marges importantes. La publication des derniers chiffres semestriels de Neuf Cegetel est édifiante à ce sujet. Les clients « entreprises » représentent un tiers des revenus du groupe, mais 60% de son excédent brut d'exploitation, autrement dit, cela rapporte beaucoup plus que les activités grand public.

Completel a des réseaux de fibres dans certaines zones d'activité et est client de nombreux réseaux d'initiative publique. Il a récemment déployé un résesau multivilles pour le dégroupage, dont Darty est utilisateur pour le grand public.

Les opérateurs nationaux du câble ont toujours fait des incursions dans le domaine des services aux entreprises, sans réellement le développer. Il ne s'agissait pas de câbler les zones d'activité, mais de desservir les nombreuses entreprises (ou services publics) qui se trouvent dans les zones de logement desservies par le câble, et qui représentent la majorité des emplois.

En pratique il s'est surtout agit de vendre des services grand public améliorés (débit supplémentaire, plus d'espace disque ou d'adresses mail, hot line spécifique...).

En construisant un réseau de dégroupage adsl multivilles, Completel avait la même ambition : pouvoir adresser les TPE, voire PME avec des services adsl améliorés. Pour le grand public, des accords comme celui passé avec Darty étaient censés contribuer à financer ce réseau.

Inversement, les opérateurs de réseaux câblés, à commencer par Noos, ont longtemps afficher l'ambition de vendre leurs services sur l'adsl dans les villes non câblées par eux, en valorisant leur marque. La restructuration interne du câble a pris le pas sur cette stratégie.

Le rapprochement permet donc des synergies, mais elles semblent limitées.

Le réseau de dégroupage de Completel est pour l'essentiel dans les plus grandes villes, celles qui sont câblées (voir les cartes sur le site de degroupnews). Cependant il atteint parfois d'autres villes, comme St Lo, Coutances, Avranches et Cherbourg dans la Manche, un département pas du tout câblé. Cela vaut-il le coup de mixer les technologies pour un nombre limité de villes moyennes ? La marque Numericable est-elle vraiment utilisable, compte tenu des aléas récents ? Faut-il financer l'extension du réseau de dégroupage pour que cela vaille le coup et passer par l'offre de gros de France Télécom, dans un marché qui croît moins vite qu'avant ? Cela ne paraît pas très évident.

Inversement, utiliser le réseau câblé pour desservir une entreprise fait sens pour Numericable. Mais les investissements réalisés par Completel dans son réseau de dégroupage ne sont alors plus valorisés.

L'intérêt principalement financier semble le plus évident ; mais Cinven et Altice ne pourront pas se permettre de dégrader la qualité de service avec des clients forcément plus exigeants que le grand public.