Numérique / Territoires

Prendre des mesures structurelles pour assurer le pluralisme audiovisuel Décembre 2005

L'annonce du rapprochement entre TPS et Canal Sat est un épisode significatif de la convergence qui bouleverse l'économie des medias et des opérateurs de réseaux de communications électroniques.

L'alliance des trois grands acteurs de la télévision commerciale est une réponse à la montée en puissance des opérateurs, à leur entrée sur le marché des droits audiovisuels. Elle anticipe un positionnement très probable de France Télécom comme distributeur de chaînes gratuites sur la TV par adsl en 2006, à la suite de Free, Neuf Cegetel et Alice.

La fusion envisagée des bouquets intervient dans un secteur aujourd'hui très concentré et intégré verticalement. Les trois chaînes analogiques représentaient 87% du budget des chaînes et 90% de l'audience. Pour les 104 autres chaînes nationales du câble et du satellite, les trois quarts sont déjà dans les mains des actionnaires de TPS et Canal Sat, et le quart restant est toujours globalement déficitaire. De plus, il y aura des conséquences en série sur le rapprochement des chaînes éditées par les deux bouquets.

Ce rapprochement remet en cause la tentative d'utiliser la TNT pour rendre le paysage audiovisuel davantage pluraliste. Le monopole de Canal+ sur la télévision payante hertzienne en analogique serait reconstitué par une fusion sur la TNT, (comme sur le satellite), et l'alliance des trois grands groupes marginalise tous les nouveaux entrants.

Il ne reste que le câble, et potentiellement la TV sur adsl, pour ouvrir le jeu.

Dans ces conditions, il faut prendre des mesures structurelles pour assurer le pluralisme audiovisuel.

Tout d'abord, si cette fusion se réalise, il y a manifestement un changement substantiel par rapport aux conditions qui ont présidé à l'attribution des chaînes de la TNT. Il faut revoir les attributions, l'équilibre gratuit/payant (et, rappelons-le au passage, faire une place aux télévisions de proximité d'initiative locale).

De plus, il est impératif de publier le décret institué par la loi d'août 2000, sur l'obligation de reprise de chaînes indépendantes par les distributeurs, toujours en panne après plusieurs consultations publiques. De même le décret donnant au CSA des pouvoirs dans les litiges entre chaînes et distributeurs est toujours bloqué.

Plus fondamentalement ce mouvement montre la nécessité de rapprocher le CSA et l'ARCEP (ex-ART). Il est aujourd'hui impensable de réguler les contenus indépendamment de l'accès aux réseaux. Mais si l'ARCEP est mieux armé sur les analyses économiques, il ne faudrait pas que les exigences de pluralisme, dont le CSA est légalement chargé, soient marginalisées dans ce rapprochement indispensable.

Paris, le 13 décembre 2005

Martial GABILLARD

Président