Numérique / Territoires

Très haut débit : c'est parti Novembre 2006

Rachat de Citéfibre par Free, offres à 30 et bientôt 100 Mbit/s sur le câble, élaboration d'un label très haut débit pour les zones d'activité et pour le logement, positions de l'Arcep sur la mutualisation des infrastructures et sur le partage de la valeur avec le secteur audiovisuel... Le sujet est désormais incontournable tant pour les opérateurs que pour les collectivités.

Chaque pays possède ses caractéristiques propres (densité d'habitat, poids des opérateurs, rôle des collectivités...). Ce mouvement touche l'Asie, en tête du déploiement, les Etats Unis, avec une guerre féroce entre opérateurs de câble et telcos, les capitales européennes (Stockholm, Amsterdam, Vienne...).

En France, comme dans d'autres pays européens, les collectivités ont joué un rôle pionnier et 80 réseaux d'initiative publique poussent la capillarité vers la desserte, en particulier des zones d'activité. Ce rôle devrait se renforcer.

La fibre indispensable

L'ARCEP vient de publier sa feuille de route pour le développement du très haut débit, à l'issue de plusieurs constats sur l'évolution des besoins, des offres et des techniques :

  • pour le grand public, « L'augmentation continue des besoins d'échanges de fichiers, le développement de la haute définition, les modes de consommation asynchrones (téléchargement, vidéo à la demande) rendent le développement de réseaux fibre inéluctables à moyen et long terme. »
  • pour les professionnels, « Les conditions sont en passe d'être réunies pour que les opérateurs puissent investir massivement dans la fourniture de services à très haut débit aux entreprises, à des tarifs attractifs. Il s'agit d'un enjeu majeur pour la compétitivité des entreprises françaises à moyen terme.
  • la fibre sera indispensable pour monter en débit

Pour cette évolution, l'ARCEP identifie 3 domaines d'action : baisser le coût du génie civil, mutualiser les réseaux internes aux immeubles, et accéder aux contenus audiovisuels ; les deux premiers concernent directement les collectivités.

Baisser le coût du génie civil

Seul hic, les déploiements à faire sont trop coûteux pour être pris en charge par les opérateurs privés pour reconstruire un réseau, sauf dans des cas très particuliers comme Paris, même à Lyon ou Marseille. Sur la moyenne des villes câblées, c'est à dire la plupart des villes denses, le coût de reconstruction d'un réseau monterait à 5000 euros par prise, ce qui n'est pas amortissable, ni finançable par les collectivités.

Il est donc impératif de réutiliser au maximum le génie civil existant. L'ARCEP veut notamment évaluer l'utilisation possible des fourreaux de France Telecom. Pour le régulateur, la réussite ou les manœuvres pour faire échouer l'offre d'utilisation du génie civil dans les zones d'activité à valeur de test.

Il faut aussi profiter de tous les travaux de génie civil. Pour cela l'ARCEP suggère de renforcer la réglementation pour permettre aux collectivités d'agir plus efficacement :

  • fourniture de cartes d'occupation du domaine
  • information sur la disponibilité des fourreaux
  • obligation de pose de capacités de réserve
  • capacité à obliger les opérateurs à partager leurs ressources

Mutualiser les réseaux internes aux immeubles

Tant pour la bonne gestion de l'immeuble que pour des raisons de coût, il n'est pas souhaitable de déployer de nombreux réseaux. Et s'il n'y en a qu'un, qui ne serait pas ouvert aux autres opérateurs, les occupants n'auront pas le choix du service, ni de sa qualité.

Si la théorie est simple, la mise en pratique est complexe. La solution cible est la fibre jusqu'àu logement, mais des technologies mixte fibre/coaxial (câble ou VDSL) peuvent assurer des débits de 100 Mbit/s. De plus, un réseau interne en fibre n'a de sens que si l'immeuble est raccordable à la fibre...qui n'est pas encore déployée.

A voir également si les gestionnaires d'immeubles voudront s'occuper de ce nouvel équipement à gérer, le réseau interne, à mettre à disposition des opérateurs, et quelles entreprises vont se positionner sur ce segment : antennistes ? Opérateurs d'opérateurs ?

Pour les logements neufs ou faisant l'objet de lourdes rénovations, il faudra sans doute au départ une démarche incitative, de type label, mais aussi envisager les mesures réglementaires sur les parties génie civil : goulottes et chemins de câble, local abritant les équipements d'interface entre le réseau de l'immeuble et les réseaux des opérateurs...

Ces questions sont débattues dans le groupe de travail « logement multimedia »

Accéder aux contenus audiovisuels

L'ARCEP déclare que « Une refonte des modèles actuels de relations entre éditeurs de contenus et opérateurs de réseaux sera nécessaire pour favoriser le développement du FttH ». En effet, les revenus actuels du haut débit liés aux contenus (3 euros par mois et par abonné) sont insuffisants pour contribuer au financement de l'installation des nouveaux réseaux.

Cette question de « partage de la valeur » est fondamentale. La concentration dans le domaine de la télévision gratuite est considérable en France, avec une chaîne qui draîne plus de 50% des ressources publicitaires. Elle est encore plus forte dans la télévision payante, avec la fusion TPS/Canal Sat. Il ne s'agit pas d'opposer de vulgaires opérateurs de tuyaux à de nobles opérateurs de contenus (ou vice-versa) : les principaux groupes sont positionnés de plus en plus sur les deux (Vivendi, Bouygues, France Telecom...).

Dans leur position commune sur le très haut débit, l'AMF, l'ADF, l'ARF et l'AVICCA avaient déjà pointé la nécessité d'articuler les politiques audiovisuelles avec le très haut débit.

L'échec relatif du plan câble a eu pour raison essentielle la gestion séparée de la politique audiovisuelle : lancement de Canal+, puis de la 5e et 6e chaînes hertziennes. Il ne faut pas recommencer avec le très haut débit !