Numérique / Territoires

Vers un marché unique du Très haut débit ? Juillet 2016

Invité à présider les 10èmes assises du Très haut débit, Patrick Chaize, Président de l'AVICCA, est intervenu sur les questions tarifaires des RIPs FTTH, qui font encore l'objet de débats et d'arbitrages. Il a notamment distingué le marché professionnel, qui doit être source d'innovation, du marché grand public, où l'homogénéisation des tarifs de détail est recherchée.

 

"Mesdames et messieurs les parlementaires, élus, acteurs publics et privés du numérique,

Avant de parler d’un marché unique du Très haut débit, il conviendrait qu’il existe partout un marché. Comme vous le savez, d’ici fin 2016, environ la moitié des locaux pourra bénéficier d’un accès au THD. Il en reste donc tout autant qui en est dépourvue, et l’on sait que cette moitié coutera environ 80% de l’addition totale.

Généraliser le THD est notre première bataille, mais nous voulons aussi que les habitants ou les entreprises y accèdent partout dans les meilleures conditions tarifaires. Et le succès commercial sur ce qui est construit dynamisera les projets sur le reste du territoire, bien évidemment.

Pour clarifier le sujet, il faut distinguer clairement deux marchés du Très haut débit, le grand public, et le professionnel. Pour le grand public, oui, nous visons un marché unique des services de détail, et cela suppose que les prix de gros ne soient pas fortement divergents.  J’y reviendrai dans un instant.

Sur le marché professionnel, je dirai plutôt que nous visions des marchés de plus en plus compétitifs. Il y a en fait toute une gamme de besoins professionnels, de tailles d’entreprises – et de services publics - il y a une grande marge d’innovation pour une gamme d’offres de gros et de détails adaptés aux besoins, très évolutifs. Les RIP ont beaucoup innové sur ces questions, et il reste énormément à faire, du côté des offres activées, partagées, de l’accès à la fibre noire pour des GFU publics etc.

Aujourd’hui l’accès au FTTH pro est verrouillé dans la zone très dense, et les écarts sur les coût d’accès à la boucle locale optique dédiée, en l’absence de RIP, considérables. Il le restera longtemps dans les zones qui n’auront que le cuivre, même raccourci par des opérations de montée en débit, puisqu’il sera impossible d’avoir une offre FTTH pro, ou FTTE, et il y est même parfois impossible d’avoir du SDSL. Les marges de progression sont donc très importantes.

Revenons au grand public, et à la question sous-jacente de la tarification des RIP, qui sera sans aucun doute débattue dans les table-rondes. Il y a un an exactement, nous nous battions pour que les spécificités des RIPs soient prises en compte dans les lignes directrices de l’ARCEP. La consultation publique lancée par l’ARCEP ne donnait pas de souplesse et fixait un tarif de l’activé très élevé. Nous nous sommes mobilisés, avec d’autres partenaires, et Sébastien Soriano, au colloque de l’AVICCA de novembre, est venu reconnaître que nous avions été entendus.

Aujourd’hui c’est une autre proposition, qui vient de l’agence du numérique, qui vise un degré supplémentaire de convergence, notamment sur des segments de réseau et des questions non traités par l’ARCEP.

Nous avons plaidé et obtenu qu’y soit prise en compte la question du renouvellement des IRUs. Face aux demandes des opérateurs de renouveler à l’euro symbolique les droits d’usage, il faut en effet affirmer tous ensemble que si nous acceptons de mettre à disposition à 500 euros la prise un réseau qui en coûte mille, c’est par réalisme pour assurer la transition vers la fibre, et non pas pour créer un patrimoine privé grâce à l’argent des contribuables.

Par ailleurs, nous soutenons l’approche de la mission sur le lissage et la péréquation du raccordement de l’usager final, qui fluidifie le marché donne de la visibilité à tous les acteurs : l’abonné, le fournisseur d’accès et l’opérateur d’infrastructures. Nous sommes plus réservés sur le tarif du FTTE qui nous paraît trop élevé et devrait être considéré comme un plafond.

Je ne cacherai pas que ces évolutions sont complexes pour les collectivités qui ont signé des contrats, ou qui sont en cours de négociation. Mais nous avons intérêt à ce qu’un rapport de force national existe côté public, Etat et collectivités ensemble si possible, vis à vis des intérêts de chaque opérateur privé, qu’il soit fournisseur d’accès à internet ou opérateur d’infrastructures – a fortiori s’il est les deux à la fois.

Place au débat, donc, avec un objectif clair : l’arrivée rapide de tous les opérateurs sur tous les RIP."