Numérique / Territoires

Accès à la sous-boucle et fibre jusqu'à l'abonné : il faut se donner les moyens d'agir Janvier 2010

L’Autorité de la concurrence a émis un avis très réservé sur la montée en débits par accès à la sous-boucle locale de l’opérateur historique, pour protéger à la fois le marché actuel du haut débit et l’évolution vers le très haut débit sur fibre optique.

A cette occasion, l’Avicca tient à réaffirmer ses positions :

  • la fibre optique jusqu’à l’abonné est la cible qu’il faut viser ; l’AMF, l’ADF, l’ARF et l’AVICCA se sont prononcés pour une généralisation en dix ans ;
  • l’Etat doit donner un cadre correspondant à cet objectif lequel doit comprendre des mesures d’aides et de péréquation financière ;
  • des technologies alternatives peuvent être employées pour ne pas laisser se creuser l’écart entre les territoires ; il faut veiller à leur cohérence d’emploi avec l’objectif principal ;
  • l’action à la sous-boucle fait partie des « outils » utiles à l’aménagement numérique du territoire.

L’avis de l’Autorité appelle à cet égard une mise au point et deux précisions.

Une action massive à la sous-boucle permettrait d’améliorer les débits existants mais risquerait en effet de saper l’économie du très haut débit s’il peut se déployer dans un horizon assez proche. C’est le sens d’une partie de la réponse de l’Avicca à la consultation publique de l’Arcep. Mais il faut bien constater que le cadre national, s’il a progressé depuis un an avec des signes positifs, est encore loin de donner une réponse claire aux interrogations des collectivités sur les choix à effectuer :

  • une petite partie du grand emprunt va être fléchée vers le très haut débit, mais l’alimentation pérenne d’un fonds de péréquation a été repoussée dans la loi relative à la lutte contre la fracture numérique
  • les travaux de régulation sur la mutualisation de la fibre hors zone très dense sont enlisés.

Il ne suffit donc pas de mettre en exergue les limites de certaines solutions, mais il faut réunir les conditions d’une ambition nationale pour le très haut débit. Un projet national de très haut débit qui pousserait les opérateurs privés à écrémer les zones rentables en laissant les collectivités, sans perspectives solides, se débrouiller avec de la montée en débits sur cuivre et du satellite pour le reste du territoire, serait une catastrophe.

Par ailleurs l’Avicca tient à attirer l’attention de l’Arcep et de l’Autorité de la concurrence sur la réalité concrète des territoires, qui n’est pas constituée de « zones 1, 2 ou 3 », mais d’ensembles bâtis très différenciés, et qui sont aussi structurés par des collectivités qui tentent de donner des réponses les plus équitables possibles à leurs citoyens.

L’Autorité estime ainsi que les « solutions d’accès à la sous-boucle locale de France Télécom doivent être réservées à des situations exceptionnelles, et en priorité aux zones non-dégroupables ». Les études menées par les collectivités sur leurs territoires montrent qu’il existe des écarts considérables de coût de construction suivant les quartiers. Un quartier pavillonnaire peut être dans une zone dégroupée sans être économiquement rentable à fibrer pour un opérateur privé. Alors que les opérateurs privés ont annoncé des investissements dans la fibre optique depuis plusieurs années, aucun ne s’est encore engagé à couvrir la globalité d’une agglomération dans un délai raisonnable. L’Etat, qui envisage d’aider les opérateurs privés (labels, participation au capital, bonifications d’intérêts…) pourra-t-il les obliger à le faire ? Où aidera-t-il les collectivités à le faire ? Pour le moment, ces situations d’absence de visibilité sur le fibrage ne sont pas exceptionnelles : elles sont la règle.

Enfin, sur les zones non dégroupées, l’Avicca a récemment alerté l’Arcep sur le paradoxe qui consisterait à baisser les tarifs du « bitstream », parce qu’il serait au-dessus des coûts, tout en faisant financer l’amélioration du réseau de l’opérateur historique par les collectivités dans ces mêmes territoires.

L’adoption de mesures de précaution sur l’action à la sous-boucle ne suffit pas. L’Avicca appelle donc à un plan ambitieux sur le très haut débit en fibre optique et à une régulation qui tienne compte de la réalité différenciée des territoires.

Paris, le 4 janvier 2010

Yves ROME

Président de l’AVICCA