Donner la priorité aux télévisions véritablement locales Mai 2003
Le gouvernement vient de rendre publiques une partie de ses propositions sur la télévision locale.
L'Avicam constate avec satisfaction que certaines de ses demandes, exprimées à l'occasion de l'avant-projet de loi sur les communications électroniques, ont été prises en compte. Ainsi ce seront toutes les collectivités qui pourront éditer des chaînes locales, et cette faculté est étendue des réseaux filaires au hertzien (propositions 16, 17 et 18 de l'Avicam). C'est une avancée importante, qui permettra notamment d'intervenir sous forme de Société d'Economie Mixte, ou d'association. Elle reprend ce qui a pu se mettre en oeuvre avec succès sur les réseaux câblés.
Toutefois, l'Avicam regrette que la notion de contrats d'objectifs et de moyens pluriannuels (proposition 19) ne soit pas reprise. Ce contrat permet aux collectivités de fixer leurs objectifs de politique publique et les moyens accordés, tout en donnant la responsabilité éditoriale de la mise en oeuvre à la chaîne. Le texte actuel au contraire mentionne une possibilité d'édition indirecte par les collectivités dont le sens juridique est obscur.
L'Avicam regrette accessoirement que le satellite ne soit pas pris en compte. Son taux de pénétration locale est bien plus faible que celui du câble, mais il n'existe aucune raison de l'exclure a priori du domaine de compétence des collectivités, pour les régions de montagne par exemple.
Cependant, l'efficacité de ces décisions risque d'être limitée en pratique. En effet, la plupart des fréquences disponibles ont été préemptées pour la Télévision Numérique Terrestre, dont la viabilité et la montée en puissance sont toujours remises en question. Ainsi à Lille, Le Mans ou Angers, les fréquences proposées par le CSA pour une télévision analogique hertzienne ne permettent pas de couvrir les agglomérations.
A ce sujet, la TNT a été lancée au nom de la diversification du paysage audiovisuel. Et au nom du réalisme on inverse cette priorité, en faisant passer de 5 à 7 le nombre d'autorisations que pourra détenir un même groupe. Les trois grands groupes audiovisuels (TF1, M6 et Canal+) pourraient donc détenir 21 des 24 canaux affectés au secteur privé. Il serait temps de mettre fin aux dérives successives de ce projet et de repartir sur des bases saines et réalistes. Plus généralement, le gouvernement revient sur des mesures qui encourageaient le pluralisme. Un même opérateur pourra détenir plus de la moitié du capital, le cumul d'autorisations locales et nationales est assoupli, le cumul d'autorisations locales passe de 6 à 10 millions d'habitants. Est-il besoin de le rappeler, dans le domaine de la radio FM, chaque relèvement du plafond d'audience pour un même groupe (loi Carignon) a été suivi d'une disparition des stations locales indépendantes au profit des réseaux. L'Avicam demande donc que cet avant-projet soit encore amélioré pour donner une priorité aux télévisions véritablement locales Sans attendre, et dans un contexte de pénurie de fréquences analogiques, les choix du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel sont cruciaux. Le dossier de Nantes, où s'affrontent la Socpresse, TV Breizh en alliance avec Ouest France, et une chaîne de service public local, sera donc suivi très attentivement par tous les acteurs.
Paris, le 15 mai 2003
Martial GABILLARD
Président