Numérique / Territoires

Il faut un plan interministériel pour le très haut débit Décembre 2006

Le Ministre de l'Industrie a lancé le Forum pour le très haut débit, une structure de concertation qui regroupe les représentants des opérateurs, équipementiers, pôles de compétitivité, autres administrations, ARCEP et associations de collectivités, dont l'Avicca. Il a pour ambition d'être « un lieu d'échanges de bonnes pratiques, une force de proposition aux pouvoirs publics et un observatoire des déploiements des réseaux très haut débit ».

Ce Forum a été l'occasion de présenter « un plan d'actions », en décrivant une série de quinze mesures. Il s'agit en fait de quinze réflexions devant déboucher sur des mesures, qui suivent en grande partie les préconisations issues de la concertation publique du printemps dernier. L'objectif le plus clair est de baisser les coûts à l'entrée pour les opérateurs, en intervenant sur le génie civil, l'accès aux logements et aux bureaux etc. Des labels et propositions de recommandations pour faire évoluer le cadre réglementaire devraient en sortir d'ici six mois. L'Avicca a demandé et obtenu que le génie civil allégé fasse partie de ces mesures, car les discussions piétinent depuis des années sur le sujet.

On ne peut que se réjouir de voir ce Ministère prendre le sujet à cœur, parallèlement aux travaux que mène l'ARCEP.

Il reste néanmoins que des questions importantes ne sont pas du tout abordées, car elles ne peuvent être pilotées par le Ministère de l'Industrie. L'Avicca, comme les opérateurs de communications électroniques ou l'ARCEP, ne manque pas une occasion de rappeler que la politique audiovisuelle ne peut rester à part. L'accès aux chaînes, le partage de la valeur entre opérateurs de réseaux et de contenus, la gestion du spectre hertzien pour la haute définition, le dividende numérique vont considérablement impacter l'économie et donc le déploiement du très haut débit. Mais ces questions ne peuvent être abordées sans le Ministère de la Culture. Le débat tronqué sur le dividende numérique lors de l'examen de loi sur la télévision du futur au Sénat le mois dernier est le triste exemple de cette absence de vision globale. Le récent rapport sur l'économie de l'immatériel pointe l'importance de cette gestion du spectre.

De même, le plan d'action prévoit de « Pré-câbler les logements neufs dans le cadre du label «logement multimedia » mais aussi de « préparer avec le Ministère du Logement sa généralisation par voie réglementaire ». En effet, le label n'est qu'une mesure incitative, dont la portée réelle est totalement inconnue ; son mérite est d'amorcer le mouvement, autour d'un « référentiel » définissant les caractéristiques permettant l'arrivée du très haut débit : câblage dans le logement, dans les parties communes des immeubles, adduction, conditions d'interopérabilité ou de mutualisation etc. Pour être efficace, cette mesure devrait assez rapidement se traduire dans une réglementation obligatoire. Mais officieusement le Ministère du logement n'est pas demandeur, ayant déjà à absorber les préoccupations de développement durable, d'accès aux personnes handicapées etc. Pourtant la qualité des réseaux de communications électroniques a aussi un impact sur ces questions, en limitant les nécessités de déplacement par exemple (télétravail, téléconférences, télédiagnostics médicaux, maintien à domicile...).

La dimension « aménagement du territoire » n'est pas prise en compte actuellement, alors que des mesures pourraient être prises assez rapidement pour mettre en place un fonds de péréquation.

Résultat, l'initiative actuelle risque d'apparaître comme une action d'un Ministère en faveur de ses industriels, créant des problèmes aux autres, alors que l'enjeu réel est global pour tous les utilisateurs. Comme l'indiquait encore récemment le Président de l'ARCEP : « Véritable rupture technologique, l'avènement du très haut débit et le déploiement de réseaux en fibre optique jusqu'à l'abonné constituent un enjeu majeur pour la France et l'Europe sur le plan de la compétitivité et du développement de l'économie de la connaissance. »

Indéniablement le sujet progresse au niveau de l'Etat, mais il faut des arbitrages et une mobilisation plus générale : un véritable plan d'action interministériel reste encore à mettre en place.

>>> les quinze mesures du Ministère