Numérique / Territoires

Réponse de l'Avicca à la consultation publique de l'ARCEP sur l'offre LFO Novembre 2006

Pour l'analyse et les décisions de l'Arcep sur l'offre de raccordement LFO de France Telecom, l'AVICCA souhaite que l'Autorité prenne en considération la problématique de l'aménagement du territoire, tant pour l'extension du dégroupage que pour le très haut débit et la diversité des acteurs.

Depuis quelques années, l'Autorité a constaté que l'extension géographique du dégroupage était portée par l'action des collectivités. Aujourd'hui un tiers des départements sont engagés dans cette action, avec l'appui de la moitié des régions. Le nombre d'études en cours montre que ce mouvement ne se ralentit pas.

Il est donc nécessaire de mettre en perspective les implications comparées des deux modes d'action.

L'offre LFO

Premièrement l'offre tarifaire LFO est dégressive en sens inverse de la taille des NRA : il est moins cher de louer une fibre vers un gros NRA que vers un petit. Elle est proportionnelle à la distance pour rejoindre le NRA. Les bourgs et les villes les plus éloignés des villes centres sont donc doublement pénalisés, par la taille et par la distance. Ils sont sans doute aussi ceux qui sont le moins fibrés.

Deuxièmement, cette offre se base sur le parc de fibres disponibles, installé par France Telecom, dont le nombre est limité. De plus, l'offre tarifaire est dégressive à partir d'un nombre très important de NRA. Une fois les premiers clients servis, il ne sera plus possible d'accueillir de nouveaux entrants, pour des raisons techniques ou économiques.

Troisièmement cette offre n'est pas une offre de location de fibre nue qui laisserait à l'opérateur la possibilité de faire évoluer ses services et sa zone de couverture. Il est par exemple impossible d'utiliser la fibre sur son parcours entre deux NRA pour desservir un bâtiment ou une zone d'activité en très haut débit, ni même de repartir du NRA pour le faire. Elle enferme donc le client opérateur dans la structure du réseau de France Télécom et dans un seul service, le dégroupage.

L'offre de France Telecom peut permettre d'étendre le dégroupage, si elle se débloque, mais elle a des caractéristiques intrinsèques non favorables à l'aménagement du territoire, à la diversité des opérateurs et à l'évolution vers le très haut débit.

Les réseaux de collecte des collectivités

Les caractéristiques générales des réseaux de collecte d'initiative publique sont très différentes.

Premièrement elles ont pour objectif une large couverture des territoires concernés ; aussi, généralement, l'ingénierie tarifaire vise à diminuer le poids de la distance dans les coûts, voire à l'annuler, en effectuant des péréquations, et ne privilégie pas les gros NRA.

Deuxièmement les réseaux de collecte sont d'emblée dimensionnés pour accueillir un grand nombre d'opérateurs, et ont des obligations de transparence et d'égalité de traitement.

Troisièmement les réseaux de collecte permettent la location de fibre pour desservir d'autres sites que les NRA, à commencer par les sites d'activité, et serviront de base à des déploiements en fibre jusqu'au bâtiment ou à l'abonné. Il serait vain et anti-économique d'inciter les collectivités à agir localement sur les aménagements nouveaux si aucun réseau de collecte ne relie les zones concernées aux réseaux nationaux.

Analyser l'impact de l'offre LFO sur la couverture territoriale, la diversité et le très haut débit

L'offre LFO ne répond pas à l'ensemble des objectifs d'aménagement numérique des réseaux de collecte d'initiative publique en termes de couverture géographique, de diversité et d'évolution vers le très haut débit. Elle ne va donc pas se substituer à l'action des collectivités, mais peut l'impacter négativement.

L'offre LFO n'a, à ce jour, pas eu d'impact mesurable sur l'économie des réseaux déjà déployés, dans la mesure où la disponibilité réelle de fibres par France Telecom n'a pas fonctionné et où les opérateurs avaient déjà trouvé une offre satisfaisante sur ces réseaux. A noter également que certains opérateurs d'opérateurs ont fait des demandes sur certains segments de réseaux, là où ils avaient prévu d'utiliser des faisceaux hertziens. Les réponses ont été dans la quasi totalité des cas négatives, soient qu'il n'y ait pas eu de fibres, soit que France Télécom n'ait pas souhaité en mettre à disposition.

Néanmoins, pour les réseaux à déployer, cet impact n'est pas négligeable, car les opérateurs dégroupeurs sont parmi les premiers clients des RIP. En effet, l'offre LFO, par sa structure, constitue un écrémage du marché : elle vise les plus gros FAI, les plus courtes liaisons fibres et les plus gros NRA ; au delà de l'offre annoncée, des pratiques commerciales peuvent aggraver ces tendances. Si elle se débloque dans les faits, elle peut donc déplacer l'équilibre économique prévisionnel et entraîner, à financements publics constants, une moindre couverture territoriale où nécessiter des financements plus importants. La décision publique sera plus difficile à prendre, d'autant que la cartographie des disponibilités sur le réseau de FT restera inaccessible aux collectivités.

Au moment où l'Autorité met l'accent sur le rôle des collectivités dans le très haut débit, en premier lieu dans les sites d'activité, et en deuxième lieu pour le grand public, il convient donc d'analyser l'offre LFO, dans sa structure et dans l'ensemble de son impact, à terme, sur l'aménagement du territoire, tant en couverture qu'en diversité des offres.