Numérique / Territoires

Télévision locale de service public : se lancer en 2005 Mars 2005

En dehors de la société nationale de programmes France 3, et de ses nombreux décrochages régionaux et locaux, existe depuis 20 ans un secteur local de la télévision publique. Ses éditeurs sont très divers, mais toujours ancrés dans leurs territoires, en articulation avec les collectivités territoriales. A deux ou trois ans d'échéances électorales, il est encore temps pour les élus de se poser la question de la télévision de proximité, dégagée de tout esprit polémique ou partisan.

La vie locale est, en France, quasi-absente du media dominant : la télévision. Nos écrans sont ouverts sur le monde, à une échelle qui peut susciter la peur ou la compassion. Mais à l'échelle des solidarités, des actions communes, de la réelle démocratie participative : écran noir dans la plupart de nos territoires. Cela n'est pas sans conséquence sur la fracture sociale, l'intérêt pour l'action publique, la vie associative, économique, culturelle, sportive... Un territoire sans images perd de sa substance, alors même que la mondialisation et les réorganisations territoriales (intercommunalité, pays...) requièrent un sentiment renouvelé d'identité et de communauté dans la proximité.

Heureusement, l'année 2004 a été riche en développements pour la télévision locale de service public :

  • nouvelle loi qui donne compétence à toutes les collectivités (villes, intercommunalités, départements, régions) sur tous les supports (câble, hertzien analogique ou numérique, adsl, satellite...)
  • création par l'union des Télévisions Locales de Service Public d'un mandatement publicitaire national (« 20 fois plus ») et d'une syndication de programmes (« Réactions en chaînes »)
  • démarrage de deux chaînes hertziennes (TL7 dans la Loire, TéléNantes) et poursuite d'une centaine de chaînes sur le câble

Public ou privé ?

Cependant le CSA ne semble pas reconnaître complètement l'importance d'un secteur public local, puisqu'il a présélectionné une filiale de la Presse Quotidienne Régionale sur Angers, en écartant la candidature d'une Société d'Economie Mixte qui édite TV10 Angers depuis 15 ans, avec succès, sur le câble.

La plupart des attributions récentes de fréquence hertzienne (Marseille, Montpellier, Tours, Orléans, Grenoble...) se sont faites à des acteurs privés, sans qu'il y ait d'autres candidatures soutenues explicitement par les collectivités. Malgré tout, la quasi totalité des chaînes locales privées existantes reçoit encore... des financements publics (parrainage, publi-magazines et achat d'espace etc). Mais il s'agit d'éléments ponctuels dans une grille de programme et une logique financière privée. De plus, comme ces chaînes sont déficitaires depuis l'origine pour la plupart, se pose toujours la question de leur avenir : ne risquent-elles pas de tomber un jour dans une logique de réseau national, qui fera passer l'information locale au deuxième plan ?

Bien définir l'intérêt public et s'appuyer sur le dynamisme local

La nouvelle législation permet d'éviter les ambiguïtés. Les collectivités peuvent décider de la création de chaînes publiques, et les confier à un éditeur à travers un contrat d'objectifs et de moyens pluriannuel. Ainsi le rôle de chacun est clair : la collectivité qui alloue les moyens définit ses grands objectifs. L'éditeur met en œuvre, garde à chaque instant la responsabilité éditoriale, et rend compte annuellement de l'exécution de ses missions. Ce montage permet à une collectivité de choisir sur son territoire la structure la plus adaptée : association, société privée, SEM, régie, Société coopérative d'intérêt collectif, EPCC... Il existe souvent des structures expérimentées en audiovisuel, en travail participatif avec la population, qui peuvent porter de tels projets en se professionnalisant davantage. C'est d'ailleurs la diversité que l'on constate sur ce qui fonctionne aujourd'hui.

Une législation à compléter, des actions à entreprendre

Pour se lancer sur le satellite ou sur le câble, pas de problème, il y a de la place. Mais ce beau schéma comporte un écueil pour l'hertzien. C'est le CSA qui attribue les fréquences, et aucune priorité législative n'existe pour le service public issu des collectivités. Que dirions-nous si une instance européenne attribuait une fréquence à un grand consortium privé de presse plutôt qu'à France 5, sans avoir même à motiver un choix suivant des critères objectifs et transparents ? Manque aussi le fonds de soutien qui compenserait les différences territoriales.

Malgré ces réserves, c'est le moment de se poser la question. Il existe des télévisions dans des territoires de toutes tailles, avec des budgets modestes ou ambitieux. Pourquoi pas chez vous ?