Numérique / Territoires

Un tournant dans le Programme national Très haut débit annoncé au colloque de l'AVICCA Octobre 2012

Plusieurs annonces importantes et discours de fond ont marqué le colloque « Territoires et réseaux d’initiative publique » organisé par l’AVICCA les 18 et 19 octobre.

Fleur Pellerin, Ministre en charge du numérique, a annoncé un plan « Delta Fibre », en référence au plan « Delta LP », qui avait permis, dans les années 70, de combler le retard français en Lignes Principales pour le téléphone. Elle a dissipé des inquiétudes sur le « mix technologique » qui auraient pu laisser penser à un plan centré sur les technologies de montée en débit améliorant les réseaux existants. Elle a en effet précisé que « la fibre pour tous doit être la règle et le mix technologique l’exception ». La montée en débit sur cuivre ne donne qu’une réponse « partielle et temporaire », alors que la fibre « donne une solution durable ». Une équipe « commando » sera mise sur pied dans les prochains jours, pour très vite préciser les paramètres techniques et financiers du déploiement, ainsi que les questions de financement. L’effort financier sera « important » et « difficile dans le contexte budgétaire et financier actuel ». Elle a souligné que France Télécom/Orange, à travers l’expérimentation de Palaiseau, avait décidé de tester la fermeture du cuivre, et « décidé de passer un cap ». La « feuille de route » du gouvernement sera présentée aux parties prenantes fin novembre, et sa mise en œuvre active dès le séminaire gouvernemental de février 2013.

Cécile Duflot, Ministre de l’Egalité des territoires et du logement, intervenait pour la première fois devant les représentants des collectivités sur ce sujet, pour en rappeler l’importance. « L’accès à la connexion est devenu, vous le savez tous, une question politique majeure. Considérons le comme un droit social comme les autres, qui permet tous les autres : le droit à l’éducation, à la culture, l’accès à des services chaque jour plus variés ». Elle a critiqué trois des scénarios possibles pour passer au Très haut débit (maintien du cadre actuel, opérateur privé national, opérateur public national) en précisant que le gouvernement n’avait pas arrêté son choix.

Yves Rome, Président de l’AVICCA, a filé la métaphore à partir de la question « la mamie du Cantal a-t-elle les mêmes besoins que le geek parisien ?». En matière de télésanté, télétravail, télé-enseignement, les territoires les plus distants ont en effet des besoins de Très haut débit supérieurs à ceux des urbains ! Il a dressé les conditions de la réussite, notamment un financement pérenne de l’Etat pour la péréquation, en appelant le « geek parisien » à une effort de solidarité… qui pourrait aussi lui servir s’il veut un jour se mettre au vert. Il a appelé à passer d’une « triple plaie » des lacunes actuelles du programme national Très haut débit, à un « triple play » pour conjuguer les efforts de l’Etat, des collectivités et des opérateurs. La transition rapide du cuivre vers la fibre est aussi une condition essentielle d’économie pour les collectivités, ce qui nécessite des mesures nouvelles de régulation.

Les réseaux d’initiative publique desservent aujourd’hui plus d’un million d’usagers finals, dont 6.600 entreprises raccordées en fibre optique. Plus de 120 collectivités ont de grands réseaux en exploitation.

Jean-Ludovic Silicani, Président de l’ARCEP, a précisé que le scénario France Fibre « n'est pas la manifestation d'une soudaine créativité (..) mais d'une tendance à complexifier les choix, afin, peut-être, de ralentir l'investissement ». Il a relevé que sur les 1.750.000 prises éligibles en FTTH, 280.000 provenaient de réseaux d’initiative publique.

Étienne Dugas, Président du groupe Marais, a rappelé les enjeux industriels forts représentés par les Réseaux d’initiative publique. Avec 3,4 milliards d’euros d’investissement, c’est toute une filière qui s’est mise en place, et qui a gagné des marchés à l’exportation. Il a appelé à la reprise rapide des travaux d’attribution des aides nationales aux projets de collectivités, suspendus depuis quelques mois.

Pierre Louette, Secrétaire général de France Telecom, a indiqué que des fonds de plusieurs centaines de millions d’euros seront affectés au co-investissement sur des réseaux d’initiative publique, en plus des financements déjà annoncés pour couvrir la zone très dense et la zone AMII.

Cyril Luneau, directeur des relations avec les collectivités de SFR, a annoncé le co-investissement FTTH sur plusieurs villes ((Lille, Besançon, Palaiseau, Amiens, Boucle-de-Seine, Orsay, Val-de-Bièvres…), et l’ouverture commerciale en octobre sur Rennes, Lille, Courbevoie, Asnières, Clichy. Il s’est interrogé sur la prise de risques de construire du FTTH si en parallèle étaient lancées des opérations de passage au VDSL ou de montée en débit. Il a plaidé pour que des mécanismes « d’extinction du cuivre » soient mis en place là où SFR, ou bien les collectivités, déploient de la fibre optique.

Enfin, des utilisateurs de Très haut débit, de nombreuses collectivités et des opérateurs ont témoigné de leurs réalisations et projets pour supprimer les zones de mauvais débit, raccorder les entreprises et services publics : Somme Numérique, CU de Bordeaux, Nièvre , Cher, Oise, Sarthe, CA Toulon, CA Rennes, GCS e-santé Bretagne, Rhône-Alpes, CU de Lyon, Covage, Axione.