Numérique / Territoires

Le très haut débit, deux fois plus cher dans les zones moins denses que dans les métropoles ? Avril 2010

Demain, le haut débit va augmenter de 18 Euros par mois à la campagne, 9 Euros en zone pavillonnaire et baisser de 3 Euros en ville. Elucubration ? Cauchemar ? Non, c’est tout simplement ce qui se pourrait se passer si on appliquait au réseau cuivre de France Télécom les principes et règles qui se préparent pour le très haut débit en fibre optique.

L’ARCEP vient de publier son projet de tarification du génie civil de France Télécom, qui va être utilisé pour déployer les nouveaux réseaux. Le régulateur propose que le coût soit proportionnel au volume, donc à la longueur occupée ; or il faut évidemment d’autant plus de longueur que l’habitat est moins dense. Au contraire, pour la tarification de l’accès au réseau cuivre, la règle adoptée par le même régulateur est que l’ensemble du coût du génie civil de France Télécom est valorisé, et divisé par le nombre de lignes. Il n’est pas non plus tenu compte du volume occupé, sachant que le volume d’un câble de cuivre est plus important qu’un câble de fibres.

En plus du fourreau, il existe un facteur aggravant pour la ligne elle-même : un opérateur public national a construit les dizaines de millions de lignes téléphoniques que nous utilisons aujourd’hui pour l’adsl. L’ensemble du coût est réparti, quelle que soit la longueur. Mais demain, c’est le principe de concurrence par les infrastructures qui va être poussé au bout : les opérateurs privés vont couvrir la partie la plus rentable, et faire payer de faibles longueurs de déploiement de fibre, et de faibles loyers de fourreaux, à leurs abonnés. Et pour le reste ?

Aujourd’hui, on ne paye pas une ligne de 10 km au fond de la Corrèze dix fois plus cher qu’une ligne de 1 km à Neuilly. Quel que soit l’opérateur qui utilise cette ligne, il verse le même prix à France Télécom, pour l’abonnement téléphonique, ou pour fournir l’accès à internet (environ 9 euros/mois/ligne). Veut-on une France à plusieurs vitesses ?

Les collectivités se sont mobilisées pour apporter le haut débit pour tous, et elles n’en ont pas fini. Les règles pour le réseau de demain ne doivent pas être pires. Aussi l’Avicca demande instamment à l’ARCEP d’adopter pour commencer une tarification du génie civil à la ligne, indépendante de la longueur afin de couvrir les zones non denses, et plus généralement de tenir compte des objectifs d’aménagement du territoire dans la fixation du cadre de déploiement de la fibre optique.

Paris, le 22 avril 2010

Yves ROME,

Président de l'AVICCA